Des chercheurs de l’équipe d’écologie et évolution microbiennes de l’ESE, en collaboration avec un laboratoire de l’institut de physique du globe de Paris, décrivent dans un article paru dans Science une nouvelle espèce de cyanobactéries associée à des stromatolites et accumulant des carbonates amorphes intracellulaires par un mécanisme de biominéralisation inconnu à ce jour.

Laboratoire Ecologie, Systématique et Evolution
Image en microscopie électronique à balayage d’une cellule de Candidatus Gloeomargarita lithophora

Depuis longtemps, les cyanobactéries focalisent l’attention des scientifiques. Elles ont joué un rôle majeur dans l’histoire de la Terre, notamment en conduisant à l’oxygénation de l’atmosphère terrestre. Elles sont également à l’origine des chloroplastes des algues et plantes terrestres. Il était admis jusqu’ici que les cyanobactéries induisaient la précipitation de carbonates de calcium à l’extérieur de leurs cellules, favorisant ainsi la formation de roches carbonatées telles que les stromatolites. C’est pourquoi leurs traces ont été recherchées dans l’enregistrement géologique ancien sous la forme de fossiles de cellules encroûtées par des carbonates. Mais la découverte d’une espèce de cyanobactérie capable de contrôler activement la formation de carbonates de calcium amorphes intracellulaires remet en question ce paradigme. C’est qui vient d’être publié par une équipe de l’unité Ecologie, Systématique et Evolution (Univ. Paris-Sud/CNRS) en étroite collaboration avec des chercheurs de l’Institut de Minéralogie et de Physique des Milieux Condensés (Univ. Pierre et Marie Curie/CNRS), et aussi du laboratoire de Minéralogie et de Cosmochimie du Muséum (MNHN/CNRS), de l’Institut de Physique du Globe de Paris (IPGP/CNRS) et de l’université de Stanford dans une étude publiée dans la revue Science.

Cette nouvelle espèce de cyanobactéries qu’ils ont nommée Candidatus Gloeomargarita lithophora est issue d’une lignée qui a divergé précocement chez les cyanobactéries et qui est associée à des stromatolites. Ces chercheurs ont montré que les cyanobactéries de cette espèce contrôlent la formation de carbonates de calcium, magnésium, baryum et strontium amorphes à l’intérieur de leurs cellules et non pas à l’extérieur, utilisant un mécanisme de biominéralisation jusque-là inconnu. La découverte de ce nouveau mécanisme a d’importantes implications pour l’interprétation du registre fossile ancien. En effet, si les cyanobactéries anciennes associées aux stromatolites induisaient la précipitation de carbonates à l’intérieur de leurs cellules et non pas à l’extérieur, elles ne se seraient pas encroûtées et n’auraient pas pu être préservées dans le registre fossile. Une telle hypothèse expliquerait pourquoi les plus vieux fossiles de cyanobactéries n’ont que 700 millions d’années alors que les cyanobactéries sont apparues sur Terre plus d’un milliard et demi d’années auparavant.

Source :
An Early-Branching Microbialite Cyanobacterium Forms Intracellular Carbonates, Estelle Couradeau, Karim Benzerara, Emmanuelle Gérard, David Moreira, Sylvain Bernard, Gordon E. Brown Jr., Purificación López-García – Science, 27 avril 2012

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